Le soir du 13 novembre, je me suis réveillée à minuit pour aller au laboratoire. Je devais préparer des gâteaux pour une manifestation importante le lendemain : l’animation en gâteaux autour de la découverte d’autres pays pour 340 enfants. En démarrant ma voiture, j’ai entendu à la radio qu’on allait donner l’assaut au Bataclan. Il m’a fallu un bon moment pour comprendre de quoi ils parlaient et je suis restée des longues minutes ainsi, moteur en route, à écouter la radio, hébétée. Je n’avais plus qu’une envie : m’enfuir, rentrer à la maison auprès de ma famille.
J’étais persuadée que la manifestation du lendemain serait annulée, mais j’avais besoin de m’accrocher à quelque chose qui me redonne espoir dans l’humanité. J’ai passé donc toute ma nuit seule dans mon laboratoire, à écouter le décompte insoutenable des victimes et à préparer des gâteaux et des décorations en pâte à sucre. J’ai modifié mon choix initial des pays pour l’animation et je me suis concentrée sur l’Afrique, la Chine, l’Inde et Paris.
Samedi matin, sur les lieux de la fête, les visages étaient fermés mais personne ne parlait des évènements de la nuit. Chacun installait son animation, donnait un coup de main au voisin. A 8h30, les premiers enfants sont arrivés. Et jusqu’à 20h, nous avons été pris dans un tourbillon des rires, d’espiègleries et de joie. J’ai décoré des cupcakes avec des enfants tellement différents. J’ai échangé avec eux en français, anglais, italien, espagnol, hongrois. J’ai même appris quelques mots d’arabe et d’allemand ! C’était comme notre revanche sur toutes ces attaques meurtrières, tout ce mépris de la vie.
Et voilà que Bouchra, finaliste du Championnat du Monde de cake designe, artiste que j’aime énormément pour son talent et sa générosité, m’envoie un message. Elle me demande de participer à une collaboration pour créer un gâteau en hommage aux victimes de Paris et de cette guerre horrible. J’ai dit oui bien avant de finir de lire son message. J’ai trouvé formidable cette initiative de se retrouver avec des amis cake designers, à porter ensemble ce message si fort. Mais quelle surprise de découvrir que mon téléphone n’arrêtait pas de sonner ! Les alertes Facebook arrivaient les unes après les autres ! 80 cake designers internationaux avaient répondu à son appel. Mes dieux du cake design étaient là, dans le même groupe que moi, nous parlant de leur amour pour Paris et pour la France.
J’ai passé un mois rempli d’émotion. Nous avons échangé sur nos projets, parlé de nos peurs, nos espoirs, nos frustrations devant une violence que nous avions du mal à comprendre. Nous avons surtout beaucoup parlé des victimes innocentes partout dans le monde, de Gandhi, Martin Luther King, Hendrix, Lennon, Roger Glover, Renaud.Voici donc venu le jour où nous partageons avec vous nos créations, à travers lesquelles tous ensemble, nous nous insurgeons contre ces guerres qui sans relâche frappent le monde. Qui veulent instiller en nous la haine envers l’autre. Nous souhaitons diffuser un message de paix, de solidarité et de lutte contre la violence en faisant une création sucrée pour apporter plus de douceur dans ce monde devenu fou.
J’ai eu à peine une demi-journée pour réaliser ma pièce, et je n’ai pas pu représenter certains détails. Elle parle des enfants et des jeunes, qui par leur optimisme, parfois leur insouciance et surtout leur innocence, passent outre les moments durs et nous donnent de la force. Mes personnages sont maintenant quelque part en dehors de la guerre, ils se soutiennent, se consolent, tandis qu’autour la nature reprend place, les protège. Une question me taraude sans cesse désormais : comment pouvons-nous à notre tour protéger les enfants du monde ?
L’intégralité des œuvres peut être visionnée ici.
Soyez à nos côtés ! Répandez la joie autour de vous, et faites plein des gâteaux !